Aux origines du cinéma maghrébin féminin
Quelle place occupent les femmes dans les débuts du cinéma maghrébin ?
La place des femmes dans le cinéma maghrébin s’inscrit dans le temps long, bien que leur contribution reste, en partie, méconnue du grand public.
C’est pourtant en Tunisie que le premier film arabe à voir le jour est aussi le premier à mettre à l’honneur une actrice locale : en 1924, Albert Samama Chikly, un juif tunisien, réalise un court-métrage, Zohra, avec l’aide précieuse de sa fille Haydée, à la fois scénariste et tête d’affiche. Cette famille d’artistes, passionnée par la nouvelle technologie qu’est le cinéma, s’était déjà illustrée en 1897 en organisant les premières projections de films à Tunis. Le duo père-fille poursuit l’aventure avec un premier long-métrage, La Fille de Carthage (Aïn el ghazel, 1924), réalisé trois ans avant le premier long-métrage de fiction égyptien. Ce mélodrame typique des années 1920 raconte l’histoire d’une jeune fille qui, confrontée à la perspective d’un mariage arrangé avec un homme plus âgé, s’enfuit avec un jeune instituteur et se suicide dans le désert lorsqu’il est assassiné par des hommes armés engagés par sa famille. Sa prestation vaut à Haydée d’être repérée par Rex Ingram, un metteur en scène américain, avec lequel elle travaille par la suite dans un mélodrame caractéristique du cinéma colonial, L’Arabe, aux côtés de Ramon Novarro et Alice Terry. Sa famille refusant de la laisser poursuivre sa carrière aux États-Unis, Haydée s’oriente vers l’écriture et déménage à Alger après s’être mariée.
Le succès du cinéma hollywoodien, mais surtout du cinéma égyptien, incite les autorités coloniales à promouvoir un cinéma mettant en scène des acteurs maghrébins pour le public local. De nombreux chanteurs et chanteuses de la région y font leurs premiers pas en tant qu’actrices et acteurs. Nombre d’entre eux proviennent du théâtre, notamment du théâtre algérien dont les pères fondateurs sont Allalou, Rachid Ksentini et le ténor Mahieddine Bachtarzi. La distribution laisse la part belle aux hommes, mais de nombreuses femmes issues du théâtre et de la chanson apparaissent aussi à l’écran, comme Widad, une vedette de la musique des années 1920, qui joue avec la célèbre actrice Keltoum dans la comédie musicale La Septième porte d’André Zwobada en 1946. Après l’indépendance, Keltoum sera l’inoubliable vedette du Vent des Aurès de Mohammed Lakhdar-Hamina, prix de la première œuvre au festival de Cannes 1967.
Cet investissement relatif dans le cinéma local n’empêche pas des actrices-chanteuses de vouloir conquérir Le Caire, capitale incontestable du cinéma arabe. La Tunisienne Hassiba Rochdi rencontre dès 1948 un grand succès dans les rôles-titres de plusieurs comédies musicales égyptiennes – la légende voudrait que sa fin de carrière soit due à sa rivalité avec la star incontestable de l’époque, Oum Kalthoum. Des danseuses tirent aussi leur épingle du jeu, comme l’Algéro-Marocaine Leila, qui joue avec Farid al-Atrache dans le célèbre film Ne le dis à personne (Ma takulshi la hada) en 1952.
Hajer Ben Boubaker
C’est pourtant en Tunisie que le premier film arabe à voir le jour est aussi le premier à mettre à l’honneur une actrice locale : en 1924, Albert Samama Chikly, un juif tunisien, réalise un court-métrage, Zohra, avec l’aide précieuse de sa fille Haydée, à la fois scénariste et tête d’affiche. Cette famille d’artistes, passionnée par la nouvelle technologie qu’est le cinéma, s’était déjà illustrée en 1897 en organisant les premières projections de films à Tunis. Le duo père-fille poursuit l’aventure avec un premier long-métrage, La Fille de Carthage (Aïn el ghazel, 1924), réalisé trois ans avant le premier long-métrage de fiction égyptien. Ce mélodrame typique des années 1920 raconte l’histoire d’une jeune fille qui, confrontée à la perspective d’un mariage arrangé avec un homme plus âgé, s’enfuit avec un jeune instituteur et se suicide dans le désert lorsqu’il est assassiné par des hommes armés engagés par sa famille. Sa prestation vaut à Haydée d’être repérée par Rex Ingram, un metteur en scène américain, avec lequel elle travaille par la suite dans un mélodrame caractéristique du cinéma colonial, L’Arabe, aux côtés de Ramon Novarro et Alice Terry. Sa famille refusant de la laisser poursuivre sa carrière aux États-Unis, Haydée s’oriente vers l’écriture et déménage à Alger après s’être mariée.
Le succès du cinéma hollywoodien, mais surtout du cinéma égyptien, incite les autorités coloniales à promouvoir un cinéma mettant en scène des acteurs maghrébins pour le public local. De nombreux chanteurs et chanteuses de la région y font leurs premiers pas en tant qu’actrices et acteurs. Nombre d’entre eux proviennent du théâtre, notamment du théâtre algérien dont les pères fondateurs sont Allalou, Rachid Ksentini et le ténor Mahieddine Bachtarzi. La distribution laisse la part belle aux hommes, mais de nombreuses femmes issues du théâtre et de la chanson apparaissent aussi à l’écran, comme Widad, une vedette de la musique des années 1920, qui joue avec la célèbre actrice Keltoum dans la comédie musicale La Septième porte d’André Zwobada en 1946. Après l’indépendance, Keltoum sera l’inoubliable vedette du Vent des Aurès de Mohammed Lakhdar-Hamina, prix de la première œuvre au festival de Cannes 1967.
Cet investissement relatif dans le cinéma local n’empêche pas des actrices-chanteuses de vouloir conquérir Le Caire, capitale incontestable du cinéma arabe. La Tunisienne Hassiba Rochdi rencontre dès 1948 un grand succès dans les rôles-titres de plusieurs comédies musicales égyptiennes – la légende voudrait que sa fin de carrière soit due à sa rivalité avec la star incontestable de l’époque, Oum Kalthoum. Des danseuses tirent aussi leur épingle du jeu, comme l’Algéro-Marocaine Leila, qui joue avec Farid al-Atrache dans le célèbre film Ne le dis à personne (Ma takulshi la hada) en 1952.