Femmes et cinéma dans les pays du Maghreb : de la comédie à la réalisation
Comment les femmes sont-elles passées de la comédie à la réalisation dans le cinéma maghrébin ?
Si, en Tunisie, les efforts précurseurs de la famille Chikly n’ont pas immédiatement abouti à une production locale plus massive, l’Algérie voit son cinéma se développer, en dehors du contrôle français, durant la Guerre d’indépendance, avant de connaître son âge d’or. Quant à la place des femmes dans l’industrie cinématographique, la tradition théâtrale ouvre la voie dans les années 1940, en Tunisie comme au Maroc, aux premières carrières d’actrices de cinéma. Cependant, il faut attendre la décennie 1970 pour voir émerger les premières réalisatrices maghrébines.
Né dans les maquis, le cinéma algérien sert d’abord à illustrer la lutte du peuple algérien. À l’indépendance s’ouvre son âge d’or, avec de multiples productions financées par l’État. L’écrivaine Assia Djebar montre la voie aux réalisatrices algériennes : elle est en 1978 l’auteure du premier film algérien réalisé par une femme, La Nouba des femmes du Mont Chenoua. À mi-chemin entre fiction et documentaire, l’œuvre est un vibrant hommage aux femmes algériennes par celle qui justifiera son choix en déclarant : « Je me suis dit que la femme est privée d’image : on ne peut pas la photographier et elle-même n’est pas propriétaire de son image. »
Les cinémas tunisien et marocain ont pu compter sur une tradition théâtrale qui verra émerger la première génération de comédiennes, lesquelles marqueront par la suite le début du cinéma. Ainsi, dès 1925, la jeune chanteuse Habiba Msika joue le rôle de Roméo dans une adaptation théâtrale de Roméo et Juliette par le Tunisien Mahmoud Bourguiba. La pièce fait scandale, notamment à cause du baiser qu’elle échange avec l’actrice libyenne Rachida Lotfi, interprétant Juliette. Au Maroc, c’est la célèbre comédienne Habiba El Madkouri (1927-2011) qui, dans les années 1940, défie la première les interdits en montant sur les planches ; mais c’est une actrice berbère, Itto Bent Lahsen (née vers 1915) qui sera la première à jouer dans un film, de production française – le Maroc est alors sous protectorat français – Les Noces de sable d’André Zwobada (1948). Puis c’est Amina Rachid (1936-2019) qui foulera les planches plus de 3000 fois et sera la vedette de films marocains cultes comme Lalla Hobby (Mon amour, 1996).
En Tunisie comme au Maroc, il faut attendre la deuxième moitié des années 1970 pour voir émerger les premières femmes réalisatrices. La Marocaine Farida Benlyazid réalise en 1978 le premier court-métrage féminin, le bien nommé Identité de femme ; s’ensuit une longue carrière de réalisatrice de fictions. En Tunisie, le docu-fiction Fatma 75 (1976) raconte le combat de l’émancipation des femmes à travers l’amélioration du code du statut personnel : il fait de Salma Baccar la première femme réalisatrice d’un long-métrage documentaire en Tunisie.
Que ce soit en Algérie, en Tunisie ou au Maroc, la présence des femmes dans tous les métiers du cinéma ne se démentira pas durant les décennies suivantes.
Hajer Ben Boubaker
Né dans les maquis, le cinéma algérien sert d’abord à illustrer la lutte du peuple algérien. À l’indépendance s’ouvre son âge d’or, avec de multiples productions financées par l’État. L’écrivaine Assia Djebar montre la voie aux réalisatrices algériennes : elle est en 1978 l’auteure du premier film algérien réalisé par une femme, La Nouba des femmes du Mont Chenoua. À mi-chemin entre fiction et documentaire, l’œuvre est un vibrant hommage aux femmes algériennes par celle qui justifiera son choix en déclarant : « Je me suis dit que la femme est privée d’image : on ne peut pas la photographier et elle-même n’est pas propriétaire de son image. »
Les cinémas tunisien et marocain ont pu compter sur une tradition théâtrale qui verra émerger la première génération de comédiennes, lesquelles marqueront par la suite le début du cinéma. Ainsi, dès 1925, la jeune chanteuse Habiba Msika joue le rôle de Roméo dans une adaptation théâtrale de Roméo et Juliette par le Tunisien Mahmoud Bourguiba. La pièce fait scandale, notamment à cause du baiser qu’elle échange avec l’actrice libyenne Rachida Lotfi, interprétant Juliette. Au Maroc, c’est la célèbre comédienne Habiba El Madkouri (1927-2011) qui, dans les années 1940, défie la première les interdits en montant sur les planches ; mais c’est une actrice berbère, Itto Bent Lahsen (née vers 1915) qui sera la première à jouer dans un film, de production française – le Maroc est alors sous protectorat français – Les Noces de sable d’André Zwobada (1948). Puis c’est Amina Rachid (1936-2019) qui foulera les planches plus de 3000 fois et sera la vedette de films marocains cultes comme Lalla Hobby (Mon amour, 1996).
En Tunisie comme au Maroc, il faut attendre la deuxième moitié des années 1970 pour voir émerger les premières femmes réalisatrices. La Marocaine Farida Benlyazid réalise en 1978 le premier court-métrage féminin, le bien nommé Identité de femme ; s’ensuit une longue carrière de réalisatrice de fictions. En Tunisie, le docu-fiction Fatma 75 (1976) raconte le combat de l’émancipation des femmes à travers l’amélioration du code du statut personnel : il fait de Salma Baccar la première femme réalisatrice d’un long-métrage documentaire en Tunisie.
Que ce soit en Algérie, en Tunisie ou au Maroc, la présence des femmes dans tous les métiers du cinéma ne se démentira pas durant les décennies suivantes.