L’engagement des femmes à travers le cinéma au Proche-Orient
Quelle est la place des femmes dans le cinéma du Proche-Orient ?
Au Liban, le cinéma se développe à partir de l’indépendance, en 1943. Mais il faut attendre les années 1960-70 pour qu’il y connaisse un essor significatif : c’est alors que de nombreux cinéastes étrangers, en particulier syriens et égyptiens, y voient une terre de possibilités. En Égypte, l’autoritarisme de Nasser, la nationalisation des studios incitent de nombreux réalisateurs à s’installer au Liban, qui devient pour plusieurs années le décor et le lieu de tournage principal de l’industrie égyptienne.
Cette période coïncide avec l’adaptation cinématographique des plus célèbres opérettes de Fayrouz. La réalisation est déléguée à deux des plus célèbres réalisateurs égyptiens : Youssef Chahine pour Le Vendeur de bagues (Biya el-Khawatim) et Henry Barakat pour L’Exil (Safar Barlek, 1967) et La Fille du gardien (Bint al Hares,1968 ). Coproductions syro-libanaises, ces films mettent en scène, pour la première fois dans une comédie musicale, une diva libanaise chantant en dialecte libanais sur des thématiques propres au Liban. L’adaptation des œuvres des frères Rahbani et de Fayrouz s’inscrit dans un mouvement mettant en scène des chanteuses levantines dans une production à l’adresse du Liban, de la Jordanie, de la Palestine, de la Syrie et de l’Irak. Ainsi, plusieurs films réalisés par le Libanais Mohamed Salmane mettent en scène la grande chanteuse libanaise (née en Syrie) Samira Tawfik, connue pour avoir réinvesti et modernisé le patrimoine musical populaire levantin de la dabké. Experte de la chanson bédouine locale, elle est la vedette de comédies musicales telles que Une Bédouine à Paris (Al bedawia fi Baris, 1964) et Une Bédouine à Rome (Al bedawia fi Roma,1965).
Les années 70 soulignent la liberté de ton, inégalée dans la région, du cinéma libanais. Cette décennie est aussi celle d’œuvres réalisées par des femmes qui marquent durablement le cinéma régional et mondial. Heiny Srour est la première réalisatrice arabe à voir son film sélectionné à Cannes en 1974 – qui est aussi le premier film réalisé par une femme sélectionné dans la catégorie du meilleur documentaire. L’heure de la libération a sonné (Saat El Tahrir Dakkat) est un documentaire historique proposant un témoignage exclusif de l’ex-zone libérée du Dhofar, à Oman, où la population s’est soulevée contre l’autoritarisme du sultanat d’Oman et le colonialisme britannique. Le film offre un aperçu de cette expérience politique totalement laïque, démocratique et féministe dans ce qui est alors l’une des régions les plus pauvres au monde. Tournée dans des conditions difficiles grâce au soutien financier des travailleurs omanais au Royaume-Uni, cette œuvre fait d’Heiny Srour l’une des premières reporters de guerre arabe.
Le début de la guerre civile libanaise, en 1975, réduit drastiquement la production cinématographique mais voit émerger une génération de cinéastes engagés, dont les œuvres traitent principalement des conflits politiques qui secouent le pays et de ses conséquences sur les habitants. La réalisatrice, photographe et plasticienne Jocelyne Saab est l’une des cheffes de file de cette « nouvelle vague libanaise ». Journaliste et reporter de guerre à ses débuts, elle couvre des sujets sur les conflits des années 70 et 80 et réalise plusieurs documentaires sur la guerre du Liban, la guerre d’Irak, le Kurdistan, l’Iran, la Syrie, le Golan, le Sahara occidental, les conséquences du conflit israélo-palestinien mais aussi au Vietnam. Le triptyque Beyrouth, jamais plus (1976), Lettre de Beyrouth (1978) et Beyrouth, ma ville (1982) constitue une archive fondamentale pour comprendre la guerre du Liban. Jocelyne Saab réalise trente documentaires mais aussi quatre œuvres de fiction qui abordent la question de la place des femmes dans le monde, dont Dounia (2005) ; le film est censuré à sa sortie pour sa liberté de ton et parce que la réalisatrice y dénonce l’excision mais aussi l’interdiction en Égypte, pour pornographie, des Mille et Une Nuits.
Hajer Ben Boubaker
Cette période coïncide avec l’adaptation cinématographique des plus célèbres opérettes de Fayrouz. La réalisation est déléguée à deux des plus célèbres réalisateurs égyptiens : Youssef Chahine pour Le Vendeur de bagues (Biya el-Khawatim) et Henry Barakat pour L’Exil (Safar Barlek, 1967) et La Fille du gardien (Bint al Hares,1968 ). Coproductions syro-libanaises, ces films mettent en scène, pour la première fois dans une comédie musicale, une diva libanaise chantant en dialecte libanais sur des thématiques propres au Liban. L’adaptation des œuvres des frères Rahbani et de Fayrouz s’inscrit dans un mouvement mettant en scène des chanteuses levantines dans une production à l’adresse du Liban, de la Jordanie, de la Palestine, de la Syrie et de l’Irak. Ainsi, plusieurs films réalisés par le Libanais Mohamed Salmane mettent en scène la grande chanteuse libanaise (née en Syrie) Samira Tawfik, connue pour avoir réinvesti et modernisé le patrimoine musical populaire levantin de la dabké. Experte de la chanson bédouine locale, elle est la vedette de comédies musicales telles que Une Bédouine à Paris (Al bedawia fi Baris, 1964) et Une Bédouine à Rome (Al bedawia fi Roma,1965).
Les années 70 soulignent la liberté de ton, inégalée dans la région, du cinéma libanais. Cette décennie est aussi celle d’œuvres réalisées par des femmes qui marquent durablement le cinéma régional et mondial. Heiny Srour est la première réalisatrice arabe à voir son film sélectionné à Cannes en 1974 – qui est aussi le premier film réalisé par une femme sélectionné dans la catégorie du meilleur documentaire. L’heure de la libération a sonné (Saat El Tahrir Dakkat) est un documentaire historique proposant un témoignage exclusif de l’ex-zone libérée du Dhofar, à Oman, où la population s’est soulevée contre l’autoritarisme du sultanat d’Oman et le colonialisme britannique. Le film offre un aperçu de cette expérience politique totalement laïque, démocratique et féministe dans ce qui est alors l’une des régions les plus pauvres au monde. Tournée dans des conditions difficiles grâce au soutien financier des travailleurs omanais au Royaume-Uni, cette œuvre fait d’Heiny Srour l’une des premières reporters de guerre arabe.
Le début de la guerre civile libanaise, en 1975, réduit drastiquement la production cinématographique mais voit émerger une génération de cinéastes engagés, dont les œuvres traitent principalement des conflits politiques qui secouent le pays et de ses conséquences sur les habitants. La réalisatrice, photographe et plasticienne Jocelyne Saab est l’une des cheffes de file de cette « nouvelle vague libanaise ». Journaliste et reporter de guerre à ses débuts, elle couvre des sujets sur les conflits des années 70 et 80 et réalise plusieurs documentaires sur la guerre du Liban, la guerre d’Irak, le Kurdistan, l’Iran, la Syrie, le Golan, le Sahara occidental, les conséquences du conflit israélo-palestinien mais aussi au Vietnam. Le triptyque Beyrouth, jamais plus (1976), Lettre de Beyrouth (1978) et Beyrouth, ma ville (1982) constitue une archive fondamentale pour comprendre la guerre du Liban. Jocelyne Saab réalise trente documentaires mais aussi quatre œuvres de fiction qui abordent la question de la place des femmes dans le monde, dont Dounia (2005) ; le film est censuré à sa sortie pour sa liberté de ton et parce que la réalisatrice y dénonce l’excision mais aussi l’interdiction en Égypte, pour pornographie, des Mille et Une Nuits.